Le vin est-il un produit à risque pour la santé ?

Le Credoc a publié une étude sur le vin, demandée par la Confédération des Vignerons Indépendants de France. Et là, le choc. Et Il en faut un pour chaque étude sinon ce n’est ni drôle ni rentable !
Le vin est reconnu par les français comme le deuxième produit présentant des risques pour la santé
A croire vraiment que la filière vin veut se faire du mal !
Je n’ai pas eu accès à l’étude dans tous ses détails mais son résumé donne quelques éclairages qu’il faut mieux lire à deux fois.
D’abord, quelle était la question ? : Selon vous les produits suivants présentent-ils aujourd’hui des risques pour la santé ?
Si 71% des français place la charcuterie en tête, un français sur deux cite le vin. Quel sens doit-on donner à cette réponse ?
Doit-on dire comme beaucoup que les français perçoivent le vin comme un produit alimentaire comportant des risques pour la santé ? J’ai des doutes !
La même étude a été faite en 2003 et en 2000. On peut suivre l’évolution. Chose étonnante en 2003, ils n’étaient que 26%.
Qu’est-ce qui peut expliquer cette évolution, plus du double, en 5 ans ? Il faut bien le reconnaitre, le vin a été particulièrement soumis à une évolution des mentalités du fait du renforcement de la répression routière et des nouveaux messages de santé publique comme celui concernant la consommation d’alcool pendant la grossesse. Le vin perdrait de son exception culturelle et se retrouverait perçu comme un alcool ordinaire. Mais à ce titre, on aurait aimé disposer des chiffres concernant l’alcool en général.
Puis en se penchant sur l’étude dans sa globalité, que penser des réponses données aux autres aliments :
En 8 ans, la volaille passe de 63 à 37% des Français considérant ce produit comme étant à risque pour la santé, la viande de boucherie de 68 à 35%, les fromages de 54 à 32% et le lait de 37 à 20%. A croire que ce n’est pas les récentes campagnes anti-ogm qui font de l’effet, ni la consommation en hausse des produits Bio, ni les études dénonçant les abus des pesticides et des engrais et la présence de métaux lourds dans nos aliments !
C’est étonnant tout de même cet effondrement de la perception de produit à risque pour la santé. Nous aurions une image plus qualitative et plus sécuritaire de ces aliments aujourd’hui ! Qu’est-ce qui peut bien l’expliquer ? Si quelqu’un a une idée ?

L’autre annonce « spectaculaire » de l’étude concerne le type de consommateur de vin. La société française a évolué et son rapport avec le vin également. Il n’est plus un aliment mais un produit de plaisir.
D’ailleurs, le vin tout venant est peu à peu remplacé par les AOC et vins de pays. Le vin de table est passé de 65 % en 1979 à 11 % de la production en 2005. En résumé, ce n’est plus l’ouvrier, le mineur et le paysan qui boit du vin. C’est le cadre qui le consomme maintenant, homme et femme !
Et oui, en passant, on découvre l’égalité des sexes aussi dans le vin, en affirmant que les femmes constituent aujourd’hui 45 % des consommateurs.

Pour en revenir à cet embourgeoisement du vin comme le dit le Credoc, il est vrai que vin et travail ne font plus bon ménage et que les politiques de sécurisation des postes de travail ont une réelle efficacité. Le vin n’est plus attaché à l’exercice d’un métier. Et puis les mineurs ont quasiment disparu, les travailleurs dans les champs aussi ! Et toute cette ancienne génération vieillissante laisse la place à une nouvelle plus sensible à l’augmentation qualitative du vin.
Alors voilà ! Du coup on consomme moins mais mieux ! Enfin, le croit-on !

Pour conclure, sortons notre tête de la bouteille et regardons maintenant quelles boissons nous consommons :

Si la consommation de vin baisse, celle des bulles et des alcools forts ne fait que progresser ! En effet, entre 2003 et 2007, si la consommation de boissons alcoolisées a baissé de 17%, celle des vins effervescents progresse de 36%, celle des spiritueux de 99% notamment pour les TGVR (Téquila, Gin, Vodka et Rhum), de 43% pour les whiskys et de 16% pour les anisés. Sinon, les consommations de boissons qui progressent le plus sont celles de thé (+64%), de chicorée (+112%), de boissons lactées (+64%) et d’eau en bouteille (+38%). Lors des repas principaux, déjeuner et dîner, le vin est de plus en plus concurrencé par l’eau en bouteille et les sodas. Mais je m’étonne ! Là où on nous dit que la consommation du vin est en baisse car il subit les assauts des ligues anti-alcooliques, de la loi Evin et des messages sanitaires, comment expliquer cette forte hausse des TGVR et des vins effervescents ? Pourquoi dans cette étude du Credoc demandée par la Confédération des Vignerons Indépendants de France, les TGVR ne sont pas soumis à la question principale du risque pour la santé ?

En conclusion, si on ne boit plus de vin quotidiennement mais avec modération, on consomme avec excès de l’alcool par à-coup, par trop plein, les jours de fête, classiquement avec des bulles et les autres moments, à la manière forte, identifiée sous le vocable de binge drinking, avec des spiritueux.
On peut même émettre l’idée que si le but recherché est bien l’effet de l’alcool, grisant et désinhibiteur, la nouvelle génération retrouve ce sucre si plaisant, si simple, si facile à reconnaitre comme dans pratiquement toutes ses pratiques alimentaires.
Nous sommes très loin du plaisir de la dégustation d’un vin, de la finesse de sa perception et de la complexité de ses saveurs.

Source : Credoc le vin, un produit à risques qui s’embourgeoise – Raphaël Berger – N° 216 – Novembre 2008


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