Vendredis du Vin 54 : jouons le jeu …d’une nouvelle appellation : Languedoc-Pézenas

Jouons, jouons nous demande Anne Graindorge pour cette 54ème édition des vendredis du vin, si possible les yeux bandés ou à l’aveugle comme on dit, en interdisant d’identifier la ou les bouteilles que l’on va déguster.

Ca peut être un jeu c’est certain et pour y avoir goûté, l’exercice en plus d’être très formateur vous oblige à l’humilité.
Ca peut être aussi une étape indispensable à mettre en place dans cette recherche de distinction qualitative en Languedoc.  Prenez par exemple, au hasard, la mise au point, dans cette hiérarchie des appellations du Languedoc, du Grand Cru Pézenas !
Tiré par le syndicat des Coteaux du Languedoc, il doit permettre de hisser en haut de la pyramide (ça plait beaucoup les pyramides dans les écoles de commerce, c’est pour ça) des terroirs qui ont été identifiés et qualifiés de rares, complexes et expressifs.
A côté de celui du Pic-Saint-Loup, des Grès de Montpellier, pour ne citer qu’eux parmi les 10 au total, le terroir de Pézenas doit désormais s’appliquer à respecter un cahier des charges qui définit des critères très précis.
Voici comment j’ai pu assister à ce jeu, très risqué pour les participants, d’une dégustation à l’aveugle de leurs propres bouteilles. Imaginez la partie, vous êtes vigneron, vous amenez vos cuvées que vous jugez aptes à rentrer dans le cadre de l’appellation Languedoc – Pézenas et vous vous retrouvez dans une salle de dégustation, en terrain neutre, avec vos collègues, tout aussi nus que vous, paradoxalement de par le fait que les bouteilles soient recouvertes d’un cartonnage empêchant toute identification.
Au fur et à mesure de la dégustation, les quilles se classent sur les tables, à droite celles qu’on exclut parce qu’elles présentent un défaut, à gauche celles que l’on met de côté parce qu’elles ne remplissent pas tous les critères sélectifs, et enfin, au centre, les élues, le top, les perles rares, les méritantes.
Chacun des vignerons ou coopérateurs, passant de l’une à l’autre, recherche forcément sa propre production. « Saurais-je reconnaître mes vins ? » Un jeu dans le jeu en quelque sorte !

Jean-Philippe Granier, responsable technique des Coteaux du Languedoc, mène la partie avec élégance et pédagogie. Il n’est pas si facile que ça que de sélectionner les différentes cuvées. Déguster à plusieurs c’est toujours partager ce que d’habitude, en tant que professionnel, on fait quasi quotidiennement dans sa cave ou au pied de ses cuves. Estimer qu’un vin présente un défaut ou n’est pas assez qualitatif ou typique de l’appellation quand cela peut-être son propre vin, réclame une certaine dose d’humilité. Et le résultat sera vu de tous bien évidemment !

C’est un jeu où tous les participants ont quelque chose à y gagner ! Savoir prendre un risque, se mesurer à l’altérité, accepter de travailler collectivement, pour au final proposer à la vente, aux consommateurs, certes un vin de terroir, et aussi un vin d’appartenance, un lien qui fusionne les vignerons, la terre, l’histoire, la ville de Pézenas.

Le vin nature sent le soufre chez les vins bio… ou pas

On méconnait toujours ce que fait son voisin sachant que travailler pour sa propre chapelle c’est prendre position et parfois cette position est bien bancale et rébarbative !!!

Un bel exemple avec cette interview de Thierry Julien, président de l’AIVB-LR (L’association des Vins Bio du Languedoc Roussillon) organisateur du salon Millésime Bio, salon professionnel qui continue année après année de rencontrer un franc succès et d’attirer sur le sol du Languedoc, à Montpellier, des acheteurs du monde entier soucieux d’apporter des vins variés et certifiés bio à leur propre clientèle.

Au départ, les vignerons présents doivent être certifiés en agriculture biologique. On va donc dire qu’ils sont tous bio. Voilà une chapelle. Mais , parmi eux, comme cette certification ne prend en compte que la production de raisin bio, il y a ceux qui poursuivent l’effort en cave, lors de la vinification, ceux qui font avec les moyens modernes (levurage etc…) et ceux qui poussent la philosophie sans intrants jusqu’au bout, les natures, purs et durs, allant même à ne pas utiliser ni soufre, ni cuivre. Les clochers fleurissent !

Alors que nous dit exactement Monsieur Thierry Julien : « ici vous n’allez pas trouver de vin nature. Un vin bio c’est un vin certifié, c’est un cahier des charges qu’un vigneron a appliqué, pendant 3 ans il est resté en conversion. Un vin nature c’est un vin qui n’est pas contrôlé. On ne sait pas comment il est fait. Il faut se fier à la bonne foi de celui qui l’a fabriqué (moi : ça s’appelle un vigneron Monsieur Julien). Ca ne repose sur aucune législation. Ce n’est pas sérieux. Et in fine ça aboutit à des vins qui sont les 3/4 pas bons, qui vieillissent mal, qui évoluent très mal, très en dent de scie et qui donnent un très mauvaise image du vin bio. Un vin bio n’est pas un vin nature. Ca n’a rien à voir. Ici, il n’y a que des vins bios, des gens certifiés, qui payent leur certification et qui sont contrôlés. »
La messe est dite !

Je n’ose dire que outre effectivement la profusion de vignerons en agriculture biologique, Millesime Bio représente pour beaucoup d’entre nous un des meilleurs moyens pour retrouver et découvrir des vins « natures ». Mais peut-être ne sont-ils pas considérés comme nature puisque certifiés en agriculture biologique ?

La vidéo dans son entier, un discours plus complet que mon maigre raccourcis plus haut !

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